vendredi 6 novembre 2015

Les Bushinengue

Un guerrer Saramaca (1910)


Les Bushinengués (hommes de la forêt) et leurs sous-groupes, également appelés Marrons ou Noirs Marrons, sont l'ensemble des peuples descendants d'esclaves emmenés au Suriname pour travailler dans les plantations. Les Bushinengués sont nés des grands mouvements de marronnage. Dès le XVIIe siècle, ils prirent la fuite et négocièrent très tôt les conditions de leur liberté. Certains restèrent au Suriname mais d'autres vinrent en Guyane pour travailler en tant que piroguiers pour les orpailleurs, principalement les Saramacas, réputés pour leur technique de conduite de pirogues sur les fleuves Oyapock et Approuague, sans moteur à l'époque. D'autres, chassés par les autres Bushinengués, se réfugient en Guyane, ce sont les Alukus (ou Bonis), qui se trouvent essentiellement dans la région de Papaïchton - Maripasoula. Vivants dans la forêt, ils ont reconstitué une culture propre, issue de leurs diverses origines ethniques africaines. Ils se sont adaptés à la vie amazonienne en partie grâce aux Amérindiens avec qui ils ont eu des contacts rapprochés.

Si les Alukus sont français et vivent quasiment tous en Guyane depuis longtemps, les Saramacas sont aussi présents en Guyane depuis de très nombreuses années, mais la très grande majorité d'entre eux se trouve encore au Suriname. En Guyane, ils sont surtout sur la bande littorale, jusqu'à la frontière brésilienne. Quant aux Ndjuka, certains se sont installés très tôt le long du Maroni, fleuve frontière avec le Suriname, dans la région de Grand-Santi. Beaucoup ont traversé la frontière lors de la guerre civile qui secoua le Suriname dans les années 1980.

On dénombre 6 sous-groupes de Bushinengués :

  • les Alukus (ou Bonis),
  • les Saramaca,
  • les Paramacas,
  • les Djukas,
  • les Kwintis,
  • les Matawais.

Ils parlent différentes langues en fonction des dates de Marronage : les Saramaka ou Saamaka parlent le Saamaka qui se différencie beaucoup des autres langues du marronnage du fait d'un lexique très différent (présence notamment de mots venant du portugais). Leur langue est un créole à base lexicale portugaise pour le saamaca et le matawaï, et de créole à base lexicale anglaise pour les langues aluku, ndjuka et paamaka qui s'est créolisée et a reçu les apports de langues amérindiennes et européennes. Les Paamaka, les Ndyuka et les Boni parlent chacun des langues très proches regroupées sous le terme de nenege-tongo ou bushi-tongo. Enfin, les esclaves qui ne se sont pas enfuis sont à l'origine de la création du sranan-tongo qui est une des langues officielles du Suriname.

Ils vivent principalement de chasse, pêche et de culture sur abattis. Certains commencent à avoir des activités d'entrepreneur en orpaillage (et non plus seulement d'ouvrier) et de vente d'objets aux touristes. Leur société est centrée autour de la famille et du Gran-Man, chef spirituel et religieux, qui peut être une femme, détenant les pouvoirs de juge, sage, et conciliateur. Les villages et les écarts bushinengue du coté français sont représentés par un capitaine ou un Gran Man auprès de l'administration. L'abolition de l'esclavage a mis fin à leur traque, mais l'orpaillage a généré une exploitation d'hommes sous-payés et menacés qui fait penser à une nouvelle forme d'esclavage. Le RMI (revenu minimum d'insertion) apporte parfois un appoint non négligeable, mais comme les amérindiens, ils sont assez peu représenté par les élus départementaux et régionaux.


Video : 


Ce sont des descendants d’esclaves qui ont su préserver au cœur de la forêt amazonienne des coutumes africaines. Originaire de la Côte d’Ivoire, du Congo ou de l’ex-Dahomey, ils ont, conduits par leur chef, un certain Boni, brisé leurs chaînes, gagné leur liberté et fusionner leurs langues et traditions pour fonder une seule et même communauté. Ce documentaire décrypte, pour la première fois, en réalisant un parallèle intéressant, les survivances africaines chez ce peuple.




Source : 

Langues de Guyane, sous la direction de Odile RENAULT-LESCURE et Laurence GOURY, Montpellier, IRD, 2009.

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